Ce que la plume doit à la vie

J’écris mieux que je parle. C’est certain.

J’écris presque aussi vite que je réfléchis.

Et puis parfois, j’écris mieux que je respire.

J’écris, j’écris…

J’écris façon aspirateur sans sac sans fond.
J’aspire la matière, je la trie, je la transforme en mots, en phrases, en air de rien qui fait du bien et parfois du mal. Je pille, je segmente, j’analyse, puis je recrache pour le plaisir des uns, l’utilité des autres, l’oracle des miens.

Le process reste le même, c’est l’intention et la nature de la matière qui changent tout. 

J’ai souvent l’impression de composer en artisan, en forçat. Depuis deux mois, je compose en artisan, en forçat. En masochiste, pour dire les choses. Cent pages devenues quinze, puis soixante-dix, puis vingt-cinq sous prétexte que la plume n’est pas à la hauteur de la manière dont je perçois la vie, c’est du masochisme. 

Mais je le lui dois, à la vie. Elle me donne la matière, je la lui pique goulument sans remord. Je pille, je transforme, je recrache. 

Pille, transforme, recrache. 

Je lui dois la justesse de la beauté, la cruauté et la paix de ce qu’elle me livre sur un plateau. Je lui dois des fulgurances, je lui dois de profonds moments d’introspection. Je lui dois de grandir. Je lui dois de ne jamais être seule quand je suis seule avec ma plume.

C’est une arme, cette plume. Une arme de construction massive. C’est un cadeau, c’est une malédiction.
Qu’elle s’agite, qu’elle se taise. Qu’elle fasse le bien, qu’elle dise le mal. 

Un paradoxe. Mon paradoxe chéri.

Ainsi, je me demande parfois aussi ce que la vie doit à la plume. 

Bruxelles, 2019. C’était au temps où la plume dansait.

Première(s) fois

Le feu qu’il faut nourrir et réinventer chaque soir.

Le whisky au bord du manuscrit tombé du lit de la rivière.

L’hiver, un jour. La fin du printemps, le lendemain.
(Houston, we have a problem.)

Le temple bouddhiste qui pue la vie bien que rien ne bouge.

Le violon qui grince le premier jour, un peu moins le dernier.

Le chien-garou sentinelle qui dort mais qui est libre.

Les mots, les mots partout, tout le temps, qui font trembler de l’intérieur les murs de l’édifice silencieux qu’est devenu l’écrivain qui compose.

Dix jours durant, j’ai fait ce grand voyage dans la montagne. Seule. Je me suis promis de recommencer au bout du monde. Ad Libitum.

Ce fut une belle retraite d’artiste en compagnie du temps qu’il reste.

(To be continued.)

D’une Koi à l’autre – 20/02/2022 – Alt.1300

Adrénaline mon Amour

Entendons-nous bien :

Je me cache les yeux en hurlant dans les montagnes russes (même si j’aime bien). 
Je lève le pied de l’accélérateur en bagnole quand les virages commencent à s’enchaîner trop fort. 
Je suffoque quand c’est pas moi qui pilote le bidule, que ça va trop vite (mais j’en redemande : la vie est un paradoxe).
J’ai le vertige (bien que je pratique l’escalade : on ne rit pas, s’il vous plaît).

Mais : 

Je cours après l’excitation des « premières fois » : de la dégustation de cuisses de grenouilles (c’est un exemple) au raid en chiens de traineaux (c’est une idée).
Je me délecte des secondes de sueur froide avant l’entrée sur une scène devant un public (ça m’est assez arrivé de 4 à 36 ans pour en parler).
Et puis, je me plais à multiplier les défis d’endurance qualifiés d’impossibles (on ne parle pas d’escalader douze sommets dans l’Himalaya) :

Tu ne peux pas être publiée.
Ah, ouais ?
Tu ne peux pas jouer du violoncelle sans prendre de cours.
Tu crois ?
Tu ne peux pas tatouer tout ton bras.
Ah.
Tu ne peux pas tatouer tout ton bras en une séance.
Chiche ?
Tu ne peux pas vivre de mots et d’eau fraîche (et de champagne).
On essaie pour voir ?

Vous allez me demander ce que ces miscellanées ont à voir avec l’adrénaline.

Tout justement. 

Je me souviens avoir utilisé l’occurrence très tôt dans les biographies qui accompagnaient les publications ou les passages en dédicace. Après trois tomes d’histoires de pilotes d’avion de chasse dans les pattes – écrits, édités, réécrits, réédités —, une duologie dans le tennis professionnel, puis un autre titre évoquant un adrénalinomane en goguette (+1 !) dans l’Outback, j’estimais avoir le droit d’en abuser. 

Et l’amour, Sophie ? Hein ? Le cœur qui s’emballe, les nuits trop courtes parce qu’on a peur, parce que c’est trop beau pour être vrai ? Les doutes ? Les premières fois ? On en fait quoi ?

Il est étrange ce moment où on découvre l’éléphant qui jonglait devant ses yeux depuis le début. 

Alors oui, double oui, j’ai vraiment écrit l’adrénaline dans tous ses états. Et c’est là la magie et toute la puissance de ce cercle vertueux : j’ai écrit tout ça grâce à l’adrénaline procurée par la transe de l’écriture, à laquelle je suis accro, et qui n’a pas la même odeur, pas les mêmes tenants et aboutissants que celle qui rend Z ou Andreas vivants.

Aujourd’hui, je renouvelle les terrains de jeu qui s’étendent à perte de vue quand on a compris comment le process fonctionne et à quel point on en est délicieusement atteint quand il est lancé. Tout cela procède de la même manière, chimique en l’occurrence si on se penche sur les mécanismes physiologiques à l’œuvre.
=> ICI : https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/hormone-adrenaline-2938/

C’est là que le Bordel (avec une majuscule) tient un rôle essentiel dans cette entreprise. Nourri, bien logé, blanchi de toute forme de corruption, Il crée toutes les conditions propices à l’invention d’histoires de plus en plus déjantées qui m’envoient en orbite sur cette belle planète (gare à la chute tout de même).
Le Bordel propose, je dispose, pose mes doigts sur le clavier de cet ordinateur d’où je vous écris, ici et maintenant, et me voilà partie loin, au banquet des Noces d’Orion, mon Agneau le plus connecté.

Les nuits trop courtes. Le cœur qui s’emballe. Les doutes. Les énièmes fois. Et les victoires.

Vivante. Très vivante.

N’empêche que je rêve quand même de sauter un jour en parachute. 
Et rien que de l’écrire… 

Adrenaline-free.

PS : il est possible désormais de suivre mes tribulations en vous abonnant à mon blog. Là, juste dessous. Follow the Koi…

Pipelette

“Pipelette”, ça rime avec “quéquette”.

C’est la première chose à laquelle j’ai pensé quand j’ai imaginé les articles dérivés directement de mes trouvailles pour baptiser à la criée les rubriques de ce blog.
Comme le cerveau d’un écrivain est une curieuse machine, la pipelette s’est envolée dans toutes les directions dont celle-là quand le mot a été posé. La romancière de l’amour (et un peu du c**) a dit que tout allait bien, que c’était normal. Elle a même dit que tout n’était pas perdu (peuh !).

L’autre, celle qui se construit en élargissant ses horizons, est allée chercher ailleurs – parce que la vérité est ailleurs, c’est bien connu. Et parce que la romancière de l’amour qu’elle connaît bien a déjà tiré sur ce genre de ficelles sans avoir osé carrément grimper à la corde.

Commençons par le début, et ce détail qui a son importance : dans la vie, je ne suis pas une pipelette. Pas du tout. Je suis celle qui écoute plus qu’elle ne parle. Qui écoute trop, qui entend tout ou presque, et qui voit bien par-dessus le marché (grâce à une correction qui fait péter les records de mon opticien, mais c’est une autre histoire, je digresse encore et toujours…).
En situation, je joue plutôt (bien d’ailleurs) le rôle de la plante. Une plante carnivore et donc dangereuse pour qui tente de cacher quelque chose, doublée d’une rapporteuse parce que je prends malgré moi bien trop de notes dans ma tête. En gros, tout ce qui a été proféré et acté – battements de cils compris – pourra être retourné contre vous sur le papier.
Mon lectorat est ravi quand j’en injecte des morceaux choisis dans un roman, mon entourage un peu moins quand il reçoit une explication argumentée en six paragraphes – sans l’intro et la conclusion – pour parler de ce qui ne va pas (quand ça ne va pas… Je ne suis pas un monstre vraiment).
Je vous rassure, j’envoie aussi des blocs de texte bordéliques quand vraiment la coupe est pleine, et de belles odes qui caressent dans le sens du poil dans lesquelles je pèse et pense chaque mot.

Voilà de quelle pipelette on parle dans la punchline de mon blog.
Enfin, elles sont sept maintenant puisque j’avais besoin d’une rime en -ette qui collerait aussi avec “goguette” (j’adore ce mot, je l’use à ne plus en pouvoir). Sur le coup, “quéquette” n’était pas la meilleure idée qui soit bien qu’elle aurait attiré un autre type de chaland grâce à la magie du SEO et du référencement, et qu’à l’heure où je vous écris, je serais peut-être déjà devenu sur un malentendu une star de… Non, je ne veux pas le savoir, en fait.

Je partis donc seule ; puis par un prompt renfort, nous nous vîmes sept en quittant le port.

Atchoum, Joyeux, Prof, Simplet, Timide, Dormeur, Grincheux.

Orgueil, gourmandise, paresse, luxure, avarice, colère, envie.

Et surtout : Calliope, Clio, Érato, Euterpe, Melpomène, Polymnie, Terpsichore (exit Thalia et Uranie pour faire sept : je fais ce que je veux, c’est mon blog).

Vous voyez où je veux en venir maintenant, sans l’avoir décidé ?

Vraiment, le cerveau d’un écrivain, d’une femme qui écrit, d’une romancière de l’amour (et du c**) est une machine merveilleuse qu’il faut encourager à travailler.

Atchoum (c’est de bon ton par les temps qui courent) ne sera pas paresseux au fond de la mine pour trouver en Clio la pépite qu’il cherche depuis toujours.

Vous avez donc un semblant de programme. Vous aurez compris aussi que je ne m’interdirai rien ici, à l’instar de ce que j’ai commencé à faire dans mon dernier bouquin publié (putain, trois ans…) qui commence par un O (mais qui n’est pas une histoire d’O non plus, soyons raisonnable, s’il vous plaît !).

Si vous m’avez suivie jusque-là, bravo ! Sinon, suivez la carpe Koi (celle accrochée à mon balcon qui apparaît tout en haut de la page) pour naviguer dans les méandres de ce tel bordel, en espérant y comprendre quelque chose au fil des billets. Je vous rassure, nous sommes dans le même bateau qui ne chavirera pas, ou alors on se repêchera les uns les autres et ce n’est pas grave, vraiment. Parole de Sophie Sage (ah, une idée d’article… *note*) ; j’ai survécu à toute sorte de tempêtes, je deviens spécialiste de la discipline.

Une dernière chose, pour la route : “pépite” ça rime avec “bite et “stalagmite”.

Merci.